Lors d'un échange sur la communauté privée réservée aux abonnés, Ivan Cohen, brillant universitaire titulaire d'un PhD réalisé à l'Ircam et membre du club des passionnés sur La Chaîne Guitare, a posté un commentaire tellement intéressant suite à une question que, avec son autorisation, j'ai décidé d'en faire un article que vous trouverez ci-dessous.
Ivan travaille en tant que développeur pour sa propre compagnie Musical Entropy.

Introduction
On s'en rend pas toujours compte, mais l'apprentissage de la musique et de la guitare en particulier c'est une expérience atypique par rapport à l'apprentissage d'un art graphique par exemple, des langues, ou de n'importe quelle autre compétence qui peut être liée plus ou moins à un loisir.
Je pense à l'apprentissage du code aussi. Pourquoi ? Parce que dans tous les cas, ce qui permet de garder la motivation pour jouer et progresser, ça tient de deux choses : le plaisir tiré de la pratique et de l'apprentissage ; et la capacité à observer les progrès réalisés, le feedback visible quoi.
En quoi le travail de la guitare est différent
Si on prend l'exemple du dessin, chaque fois qu'on dessine un nouveau truc il est possible de "voir" plus ou moins instantanément notre niveau et de le juger par rapport aux dessins qu'on avait fait avant. L'avantage du dessin par rapport au son c'est aussi qu'on peut apprécier une "oeuvre" d'un simple coup d'oeil, là où il faut "entendre" pendant un certain temps, pendant la durée de l'oeuvre, pour apprécier un média sonore et une performance.
On peut donc dire qu'on a un feedback sur l'apprentissage qui est instantané concernant le dessin, pendant l'exécution, et à la fin en regardant le résultat et en le comparant à d'autres.
Or dans le cas de la guitare, au niveau du feedback on est obligés d'avancer "à l'aveugle". En effet, certains progrès ne deviennent visibles qu'au bout d'un certain temps, et plus on avance et plus ce temps augmente. On a tous en tête l'expérience classique quand on est débutant du plan qui passe pas même après des jours de pratique, et qui un jour fonctionne du premier coup.
Plus tard, les fameux plateaux deviennent plus gros, et on devient obligés de travailler avec régularité, parfois pendant plusieurs semaines, sur des aspects purement mécaniques / techniques très proches du sportif qui fait de la musculation.
Et pendant ces semaines, on se pose trois tonnes de questions concernant la viabilité de ce qu'on est en train de faire, est ce que c'est la bonne méthode, pourquoi je progresse pas plus vite, combien de temps par jour il faut que je continue etc.
Passer les paliers
C'est pour ça que je dis qu'on fait des efforts "à l'aveugle", et du coup c'est parfaitement compréhensible surtout quand on est autodidacte de ressentir cette "déprime guitaristique".
Comment combattre cette déprime ? Prendre du recul déjà c'est important de temps en temps, sinon ce qui devrait être une expérience plaisante devient uniquement une expérience frustrante.
Après pour moi le plus important c'est d'aller moins dans le noir, et pour ça y a pas 36 000 choses à faire : le prof / coach est super important car il va donner des objectifs précis qui vont permettre de se poser moins de questions et d'avancer dans une direction claire, avec la méthode claire qui va bien. Et une fois qu'on aura eu l'expérience de passer un de ces plateaux là, on aura appris comment avancer dans le noir, et on pourra plus facilement se ressortir de ce genre de situations tout seul.
Le prof est également censé vous apprendre comment travailler vraiment la guitare, c'est-à-dire quoi faire d'autre que jouer toujours les mêmes plans en boucle toute la journée, notamment être régulier (il vaut mieux en faire 30 min tous les jours que 6h de temps en temps), placer des exercices techniques dans l'emploi du temps, utiliser le métronome comme outil lorsqu'on veut jouer plus propre et aller plus vite, et toujours inclure quoi qu'il arrive dans la pratique des éléments, exercices ou travail de morceaux, qui sont au dessus de nos capacités du moment pour avancer toujours un peu plus à chaque fois, au lieu de simplement se reposer sur ses acquis.
Une autre astuce pour rejoindre ce qui se fait avec le dessin c'est d'enregistrer ses progrès. Déjà, l'enregistrement en soi est une super expérience, qui oblige à redoubler d'effort pour être carré, surtout si on fait des compos à la maison.
Mais on peut aussi s'enregistrer à intervalles réguliers quand on fait ses exercices, ce qui permet de comparer au cours du temps notre jeu et notre niveau. Mon prof me disait aussi de noter dans un journal le tempo sur lequel j'arrive à jouer 4 à 5 fois d'affilée proprement un exercice donné au métronome, ce qui donne du feedback supplémentaire.
La plaisir avant tout !
Enfin, il faut que la pratique soit un plaisir, et l'ennemi de ça c'est de jouer uniquement tout seul avec du matos de merde dans un environnement de merde 🙂 J'étais dans ce cas pendant un moment, donc je peux vous conseiller là dessus en connaissance de cause !
Par contre, si vous avez une guitare top, ampli + pédales top, une enceinte que l'on peut pousser bien fort là où vous bossez (vive les maisons, les Torpedo Captor aussi et l'insonorisation), plus des potes qui viennent pousser le boeuf de temps en temps, voire un groupe, et un prof bien sûr, là cette partie là est validée !
Faut pas hésiter aussi à apprendre de nouveaux morceaux de temps en temps, à intégrer de la nouveauté de manière générale avec le matos ou l'environnement, et à utiliser tous les outils d'accompagnement qui existent aujourd'hui, genre BeatBuddy ou Backtracks de morceaux qu'on aime, et puis les morceaux originaux sur lesquels on peut toujours jouer par dessus, avec le volume à fond.
Je pense enfin que beaucoup de guitaristes pros sont influencés à mort dans leur jeu par le fait de jouer fort sur des enceintes, si ils ressentent pas le volume physiquement ils jouent beaucoup moins bien...
Ivan Cohen
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Comment progresser à la guitare en traversant les paliers – Ivan Cohen
Lors d'un échange sur la communauté privée réservée aux abonnés, Ivan Cohen, brillant universitaire titulaire d'un PhD réalisé à l'Ircam et membre du club des passionnés sur La Chaîne Guitare, a posté un commentaire tellement intéressant suite à une question que, avec son autorisation, j'ai décidé d'en faire un article que vous trouverez ci-dessous.
Ivan travaille en tant que développeur pour sa propre compagnie Musical Entropy.
Introduction
On s'en rend pas toujours compte, mais l'apprentissage de la musique et de la guitare en particulier c'est une expérience atypique par rapport à l'apprentissage d'un art graphique par exemple, des langues, ou de n'importe quelle autre compétence qui peut être liée plus ou moins à un loisir.
Je pense à l'apprentissage du code aussi. Pourquoi ? Parce que dans tous les cas, ce qui permet de garder la motivation pour jouer et progresser, ça tient de deux choses : le plaisir tiré de la pratique et de l'apprentissage ; et la capacité à observer les progrès réalisés, le feedback visible quoi.
En quoi le travail de la guitare est différent
Si on prend l'exemple du dessin, chaque fois qu'on dessine un nouveau truc il est possible de "voir" plus ou moins instantanément notre niveau et de le juger par rapport aux dessins qu'on avait fait avant. L'avantage du dessin par rapport au son c'est aussi qu'on peut apprécier une "oeuvre" d'un simple coup d'oeil, là où il faut "entendre" pendant un certain temps, pendant la durée de l'oeuvre, pour apprécier un média sonore et une performance.
On peut donc dire qu'on a un feedback sur l'apprentissage qui est instantané concernant le dessin, pendant l'exécution, et à la fin en regardant le résultat et en le comparant à d'autres.
Or dans le cas de la guitare, au niveau du feedback on est obligés d'avancer "à l'aveugle". En effet, certains progrès ne deviennent visibles qu'au bout d'un certain temps, et plus on avance et plus ce temps augmente. On a tous en tête l'expérience classique quand on est débutant du plan qui passe pas même après des jours de pratique, et qui un jour fonctionne du premier coup.
Plus tard, les fameux plateaux deviennent plus gros, et on devient obligés de travailler avec régularité, parfois pendant plusieurs semaines, sur des aspects purement mécaniques / techniques très proches du sportif qui fait de la musculation.
Et pendant ces semaines, on se pose trois tonnes de questions concernant la viabilité de ce qu'on est en train de faire, est ce que c'est la bonne méthode, pourquoi je progresse pas plus vite, combien de temps par jour il faut que je continue etc.
Passer les paliers
C'est pour ça que je dis qu'on fait des efforts "à l'aveugle", et du coup c'est parfaitement compréhensible surtout quand on est autodidacte de ressentir cette "déprime guitaristique".
Comment combattre cette déprime ? Prendre du recul déjà c'est important de temps en temps, sinon ce qui devrait être une expérience plaisante devient uniquement une expérience frustrante.
Après pour moi le plus important c'est d'aller moins dans le noir, et pour ça y a pas 36 000 choses à faire : le prof / coach est super important car il va donner des objectifs précis qui vont permettre de se poser moins de questions et d'avancer dans une direction claire, avec la méthode claire qui va bien. Et une fois qu'on aura eu l'expérience de passer un de ces plateaux là, on aura appris comment avancer dans le noir, et on pourra plus facilement se ressortir de ce genre de situations tout seul.
Le prof est également censé vous apprendre comment travailler vraiment la guitare, c'est-à-dire quoi faire d'autre que jouer toujours les mêmes plans en boucle toute la journée, notamment être régulier (il vaut mieux en faire 30 min tous les jours que 6h de temps en temps), placer des exercices techniques dans l'emploi du temps, utiliser le métronome comme outil lorsqu'on veut jouer plus propre et aller plus vite, et toujours inclure quoi qu'il arrive dans la pratique des éléments, exercices ou travail de morceaux, qui sont au dessus de nos capacités du moment pour avancer toujours un peu plus à chaque fois, au lieu de simplement se reposer sur ses acquis.
Une autre astuce pour rejoindre ce qui se fait avec le dessin c'est d'enregistrer ses progrès. Déjà, l'enregistrement en soi est une super expérience, qui oblige à redoubler d'effort pour être carré, surtout si on fait des compos à la maison.
Mais on peut aussi s'enregistrer à intervalles réguliers quand on fait ses exercices, ce qui permet de comparer au cours du temps notre jeu et notre niveau. Mon prof me disait aussi de noter dans un journal le tempo sur lequel j'arrive à jouer 4 à 5 fois d'affilée proprement un exercice donné au métronome, ce qui donne du feedback supplémentaire.
La plaisir avant tout !
Enfin, il faut que la pratique soit un plaisir, et l'ennemi de ça c'est de jouer uniquement tout seul avec du matos de merde dans un environnement de merde 🙂 J'étais dans ce cas pendant un moment, donc je peux vous conseiller là dessus en connaissance de cause !
Par contre, si vous avez une guitare top, ampli + pédales top, une enceinte que l'on peut pousser bien fort là où vous bossez (vive les maisons, les Torpedo Captor aussi et l'insonorisation), plus des potes qui viennent pousser le boeuf de temps en temps, voire un groupe, et un prof bien sûr, là cette partie là est validée !
Faut pas hésiter aussi à apprendre de nouveaux morceaux de temps en temps, à intégrer de la nouveauté de manière générale avec le matos ou l'environnement, et à utiliser tous les outils d'accompagnement qui existent aujourd'hui, genre BeatBuddy ou Backtracks de morceaux qu'on aime, et puis les morceaux originaux sur lesquels on peut toujours jouer par dessus, avec le volume à fond.
Je pense enfin que beaucoup de guitaristes pros sont influencés à mort dans leur jeu par le fait de jouer fort sur des enceintes, si ils ressentent pas le volume physiquement ils jouent beaucoup moins bien...
Ivan Cohen
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